L’île de la Réunion est forte d’une histoire particulière, marquée par un peuplement tardif et la mise en place d’une société coloniale et esclavagiste, précédant la départementalisation.
Ce passé, à la fois récent et complexe, explique la diversité et les spécificités de la société créole actuelle.
La découverte de l’île de La Réunion
On sait peu de choses sur l’île avant l’arrivée des Portugais, qui ont débarqué en 1513.
Il semblerait cependant que ce soient les Arabes qui, les premiers, aient abordé les côtes hostiles de l’île de La Réunion, comme en témoigne une carte du XIIème siècle, oeuvre du géographe arabe Al Sharif el-Edrissi.
L’histoire dispose de moins de traces concernant l’arrivée des premières flottes portugaises.
On ne sait qui de Tristan de Cunha, Diego Fernandes Pereira, Diego Lopes de Segueira ou Pedro Mascarenhas pénètre l’île avant l’insigne date du 09 février 1507, jour de la Sainte-Apolline, où elle prend le nom de Santa Apolonia.
C’est en 1520 que Pedro Mascarenhas prend l’initiative de regrouper l’île Maurice, Rodrigues et Santa Apolonia sous le nom d’Islas Mascarenhas traçant ainsi les contours de l’actuel archipel des Mascareignes.
Dans les années 1640, la Réunion est occupée par les Français, qui revendiquent la terre comme leur propriété et la rebaptisent Île Bourbon.
L’île a d’abord été utilisée pour exiler les mutins, avant l’arrivée des premiers colons.
L’île a été rebaptisée La Réunion au XVIIIe siècle, période durant laquelle elle est devenue prospère, tout comme l’île Maurice toute proche, car elle se trouvait sur les routes maritimes transportant le commerce entre l’Europe et l’Asie.
Les premiers Français
Les plantations de sucre, travaillées par des esclaves importés d’Afrique, constituaient un secteur important de l’économie en pleine croissance.
Elle a reçu le statut de département d’outre-mer de la France, en vertu duquel elle fait partie intégrante de l’État français, qui est représenté sur l’île par un commissaire.
La France n’y met le cap qu’à partir de 1638, à bord du voilier le Saint-Alexis.
L’île a été gouvernée comme une colonie française jusqu’en 1946, sauf pendant une période de cinq ans à partir de 1810 où elle a été prise par les Britanniques.
On doit l’abordage de l’île au commandant Alonse Goubert, qui à cette occasion dépose un blason aux armes du roi Louis XIII.
Une autre escadre française débarque en 1642 sous l’égide de Jacques De Pronis, alors gouverneur de l’île de Madagascar.
Cette fois, c’est un drapeau signifiant la prise de possession française de l’île, rebaptisée Mascarin, qui sera planté en un lieu encore nommé aujourd’hui La Possession.
C’est également à Jacques de Pronis qu’on doit en 1646, la décision d’exiler sur l’île Mascarin, 12 mutins en sédition contre l’autorité française de Fort-Dauphin.
Retrouvés en bonne santé, ils seront rapatriés en 1649 par Etienne De Flacourt, nouveau gouverneur de l’île Madagascar. S’accomplit alors une seconde prise de possession de l’île au nom du roi Louis XIV.
Celle-ci se nommera désormais l’île Bourbon, en l’honneur de la dynastie au pouvoir. Une nouvelle expérience d’établissement d’une colonie de mutins est tentée dans la baie de Saint-Paul par De Flacourt.
Ce sera un échec, les habitants ayant dû être évacués à la suite d’un violent cyclone.
L’époque dite « précoloniale » prend alors fin, ne laissant aucun habitant sur l’île Bourbon.
La vraie colonisation se produit avec la création de la Compagnie des Indes orientales en 1664.
A l’initiative de Louis XIV, aidé de son ministre Colbert, celle-ci a pour but d’organiser le commerce de la France dans l’Océan Indien, par la reconquête de l’île de Madagascar et des territoires voisins.
L’île Bourbon se trouve ainsi recolonisée pour le développement des plantations de café. La Compagnie des Indes établit alors des comptoirs commerciaux dans toute la zone et notamment en Afrique, à Madagascar et en Inde.
L’installation des premiers colons remonte à 1665.
Après l’envoi de contingents français et malgaches en 1667 et 1671, une requête est adressée à la France concernant l’expédition de femmes françaises, les pionniers étant contraints d’épouser leurs esclaves noires.
Plusieurs françaises accompagnées de 200 Indiennes débarqueront conséquemment sur l’île. Elles sont à l’origine des premiers natifs.
L’empreinte de l’esclavage pendant la période coloniale
L’île Bourbon tente, malgré la difficulté d’un relief montagneux, de consolider la culture du café, jointe à celle du coton, du tabac et de l’indigo.
L’exploitation de grandes cultures sera un échec pour la Compagnie des Indes orientales qui fera faillite en 1764.
L’environnement local étant plus favorable à la culture du girofle, de la muscade et de la vanille.
Interdit par un édit royal en 1664, l’esclavage se pratique pourtant sur l’île.
Le 28 août 1670, le Conseil d’état du royaume décide d’officialiser sa pratique en France.
La première main-d’oeuvre malgache débarque en 1671.
Le Code Noir sera quand à lui proclamé en 1684 sur ordonnance de Louis XIV, mais ne sera appliqué à l’usage des Mascareignes qu’en 1724.
C’est au milieu du XVIIIème siècle que le phénomène du marronnage se développe de façon considérable dans l’île Bourbon, malgré les arrivées successives de nouveaux immigrants provenant d’Afrique noire, d’Inde, des Comores ou encore du Portugal.
L’île Bourbon est rebaptisée île de La Réunion à la suite de la révolution française en 1773, en hommage à la «réunion» des Marseillais et des divers bataillons de la Garde nationale, lors de l’assaut du palais des Tuileries.
Si les suites de la Révolution française abolissent la pratique de l’esclavage en 1794, l’Assemblée coloniale de l’île de La réunion décide cependant de se maintenir sous ce régime en toute illégalité.
Napoléon Bonaparte rétablit partiellement l’esclavage en 1802, en même temps que l’île est rebaptisée à son nom.
L’arrivée des anglais en 1810, qui occuperont l’île durant 5 années jusqu’à la défaite de Waterloo, modifiera de nouveau l’histoire de l’île en lui réattribuant le nom de Isle of Bourbon.
Après une succession de décrets, l’abolition de l’esclavage prend officiellement acte en 1848 par l’intermédiaire de l’historique Décret de l’abolition de l’esclavage du 27 avril 1848.
C’est à Victor Schoelcher, alors sous-secrétaire d’état à la Marine chargée des colonies, que l’on doit son adoption.
La date de l’émancipation des esclaves est fixée au 20 décembre 1848 sous l’administration du commissaire général de la république Joseph-Napoléon Sarda-Garriga. Entre-temps, l’île redevient officiellement l’île de La Réunion.
De colonie à département Français
L’histoire crée une population métissée pratiquant la langue créole, sensiblement différente de celle des Antilles, par l’influence de l’immigration malgache, indienne et chinoise.
Toutefois, l’abolition de l’esclavage ne rend pas pour autant leurs droits aux anciens esclaves.
En effet, la France adopte en 1887 le Code de l’indigénat, forme déguisée de l’esclavage qui prive les populations locales de leur identité, maintenant de considérables privilèges pour les Blancs.
Ceux-ci craignant le déclin économique de l’île, notamment concernant la culture de la canne à sucre, décident d’embaucher des « engagés » indiens qui, en conclusion, n’arrangeront pas leurs affaires, au profit d’une main-d’oeuvre qui sera ensuite importée de Chine, d’Afrique, puis d’Inde.
La Réunion subit un déclin progressif jusqu’à son effondrement économique après la Seconde guerre mondiale.
En 1946, l’île devient département français d’Outre-mer et se dote d’un conseil régional et d’un conseil général, ce qui favorise le rétablissement de son économie.
Partie intégrante de l’Europe depuis le Traité de Rome de 1957, elle est considérée comme « Région ultrapériphérique ».